lundi 16 février 2009

Au coeur des sans terres

Bonjour,

Je reviens sur une opportunite incroyable offerte, voici 15 jours, dans l etat de bahia : une immersion dans le Mouvement des Sans Terres (MST). Une decouverte riche d enseignements sur les capacites d organisation. Un mouvement pacifiste qui souleve des montagnes.

Il me semble que quelques eclairages sont importants pour decouvrir cette structure.A vous de voir, pour lecture!

Le Mouvement des sans-terre est une organisation populaire brésilienne qui milite pour que les paysans brésiliens ne possédant pas de terre, disposent de terrains pour pouvoir cultiver.Il se réclame d'une longue filiation de lutte pour la terre dont les racines plongent jusque dans le passé colonial du Brésil.
Quand la couronne
portugaise envahit le Brésil, elle divisa la terre en grandes propriétés, appelées les capitaineries héréditaires, qu’elle offrit à des aristocrates portugais, devenant alors seigneurs ou capitans. Le rôle de ces immenses propriétés était la production agricole, l’extraction de l’or et surtout la traite des esclaves (africains et indigènes), dans le but de transiter toutes les richesses produites jusqu’au Portugal. L'agriculture se structura donc autour de grandes cultures de rentes et d'exportation.

Pendant la dictature militaire de 1964 à 1984, le pays connut la révolution verte qui entraîna la mécanisation de l’agriculture. Cette restructuration entraîna l'expulsion de petits propriétaires, les salariés agricoles des latifundios qui devinrent sans terre. Un grand nombre migrèrent vers les villes, alors que celles-ci étaient déjà confrontées à une vague de chômage
Le
7 septembre 1979, dans le Rio Grande do Sul, des paysans sans terre (la plupart expulsés par la construction de barrage) expérimentèrent la première occupation massive, dans la fazenda Macali. Ils furent fortement appuyés par la Commission Pastorale de la Terre (CPT), une organisation populaire de religieux de la théologie de la libération. Rapidement, de nombreuses occupations de latifundio s’organisèrent, côtoyant les mobilisations populaires pour le retour à la démocratie.

En
1984, la première rencontre des travailleurs ruraux sans terre officialisa la naissance du Mouvement des travailleurs ruraux Sans-Terre (MST) dont le rôle est l’organisation, l’éducation (alphabétisation, formation politique et militante des jeunes et des adultes) actions politiques (campements, occupations de latifundio, negociation avec les organismes publics, marches...).

Le MST agit autour de plusieurs principes fondateurs
- Il est indépendant de tout parti politique, de l’État brésilien et de l’Église catholique
- Tous les organes de direction doivent comprendre 50% d’hommes et 50% de femmes.

- Il ne lutte pas seulement pour la terre mais pour la réforme agraire (loi datant de 1964) juste et non commerciale (pour l’expropriation et l’attribution des terres aux personnes qui la travaillent et non la vente des terres et l’endettement des paysans comme le proposent le gouvernement et la Banque mondiale)
- Il s’organise au niveau national (23 États), international :
Confederação Latina das Organisações Camponeses (CLOC), Via Campesina, sur la base d une démocratie participative
- La production est écologique, sans pesticide, sans engrais chimique et sans OGM, favorisant une diversification des cultures, la reforestation, la culture de plantes médicinales, la nourriture pour les familles du MST et la commercialisation du surplus à des prix accessibles aux plus démunis. Les rapports de production sont coopératifs et solidaires

Aujourd'hui le MST regroupe 1,5 million de personnes (300 000 familles dans les assentamentos (terres conquises), 150 000 encore dans des acampamentos (occupations).
Il organise des occupations massives de terre de latifundio (avec entre 30 et 1000 familles) et monte des acampamento. De là commence une bataille juridique concrète, en s’appuyant sur l’article 184 de la constitution de 1988. Le rapport de force s etablit entre les mobilisations des sans-terre et le pouvoir corrupteur du grand propriétaire.
Celui-ci peut se conclure par l’expropriation de la surface de terre occupée et la transformation en assentamento, le déblocage de subventions agricoles, de moyens publics pour le salaire des éducateurs des écoles de l’assentamento et pour le poste de santé

Chaque famille conquiert l’équivalent de 10 à 20 hectares (selon les régions et le type de terre), qu’elle peut exploiter de façon individuelle, ou collective. Beaucoup de familles s’organisent en coopératives de production et de transformation (boulangerie, productions diverses)

La surface conquise par ces luttes est équivalente à 7 millions d’hectares, ce qui représente 2 fois la superficie du Danemark. La situation de la repatition des terres est encore aujourd’hui tres inegale, 1% des propriétaires terriens possèdent 54% des terres cultivables.

Les sans-terre ont construit 1800 écoles et obtenu des financements publics pour leur fonctionnement : 160 000 enfants sont scolarisés. Il existe un programme d’alphabétisation qui a touché plus de 30 000 jeunes et adultes.

Le MST tente avec ses écoles de développer de nouvelles valeurs de solidarité pour former des acteurs sociaux, de véritables citoyens, pour que les sans terre installés sur les terres légalisées restent des sans-terre, militants de la lutte pour la réforme agraire dans tout le Brésil et pour tous les Brésiliens.

La dimension éducative du MST est donc très importanteLe mouvement a reçu le Right Livelihood Award, (prix Nobel alternatif) en 1991 et le prix International Roi Baudouin pour le Développement en 1997.

Claire

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